Fiche N° 103
La Garde à Vue

1   Définition de la garde à Vue.

La garde à vue est une mesure de privation de liberté prise par un officier de police judiciaire pour maintenir à la disposition des enquêteurs le suspect d'un crime ou d'un délit. Cette mesure doit constituer l'unique moyen de parvenir à certains objectifs comme empêcher que la personne ne modifie les preuves, ne fuie ou ne consulte ses complices.

1°)   Conditions requises pour un placement en garde à vue
Une personne peut être mise en garde à vue seulement s'il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction du niveau minimum suivant :

--    L'infraction doit être un crime ou un délit.
--    Elle doit être punie par une peine d'emprisonnement.

On ne peut donc pas placer en garde à vue l'auteur d'une simple contravention, ni même celui qui a commis certains faits qui, bien que qualifiés comme étant des délits, ne sont punis que d'une simple peine d'amende.

Exemples de faits qualifiés délits mais qui ne sont réprimés que par une amende :


--    Donner une fausse adresse à un contrôleur : 3 750 € d'amende.
--    Outrage à une personne chargée d'une mission de service public : 3 750 € d'amende.
--    Insultes publiques, ou par voie de presse. ( jusqu'à 12 000 € d'amende )


En outre, la garde à vue doit constituer l'unique moyen de parvenir à au moins un des objectifs suivants :

--   Poursuivre une enquête qui nécessite la présence de la personne concernée.
--   Garantir la présentation de la personne devant le procureur afin qu'il décide si
--   des poursuites sont nécessaires.
--   Empêcher la modification ou la destruction d'indices.
--   Empêcher une concertation entre la personne concernée et d'éventuels complices.
--   Empêcher que la personne concernée ne fasse pression sur des témoins ou la victime.
--   Faire cesser l'infraction en cours.


2°)   Durée de la garde à vue
La durée de la garde à vue est de 24 heures.

Elle ne peut être prolongée jusqu'à 48 heures que si la peine encourue est d'au moins 1 an d'emprisonnement, sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République et après présentation devant celui-ci.

Pour les affaires particulièrement complexes et graves, la prolongation peut être prolongée jusqu'à 72 heures (voire 96 heures ou 144 heures, en cas de risque terroriste), sur décision du juge des libertés et de la détention (JLD) ou du juge d'instruction.

ATTENTION - Bon à savoir : Si une personne est placée en garde à vue immédiatement après son séjour en chambre de dégrisement, la durée de ce séjour est prise en compte dans la durée de la garde à vue. Ainsi, une personne mise en garde à vue après 6 heures en dégrisement devra être présentée au procureur au bout de 18 heures.
En clair, être bourré au moment d'être placé en garde à vue, ça peut toujours servir !...


Décision du Conseil Constitutionnel n°2012-253 du 8 juin 2012 relative au séjour en dégrisement :
Considérant 9 : Prise en compte du passage en cellule de dégrisement dans la durée de la garde à vue.



3°)   Fin de la garde à vue :
À l'expiration du délai, la personne gardée à vue est soit remise en liberté, soit déférée, c'est-à-dire présentée à un magistrat qui décidera des suites à donner aux poursuites.
Dans le cas où elle n'est pas remise en liberté, la personne gardée à vue peut être retenue par les services de police, avant de comparaitre, suivant sa situation, devant le procureur de la République, le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention.

NOTE : Pendant cette rétention supplémentaire, qui dure au plus 20 heures, et qui n'est qu'une simple attente, il est impossible de faire une déclaration ou de mener un interrogatoire.
En fait, c'est cette fameuse période durant laquelle vous êtes détenus au Dépôt...




2   Les Droits de la personne gardée à vue

La personne gardée à vue doit être immédiatement informée par l'officier de police judiciaire, dans une langue qu'elle comprend, de tous les droits qui lui sont désormais garantis, depuis les réformes du régime de Garde à Vue. :

1°) Vous avez le droit de garder le silence :
Vous avez en effet le droit, soit de vous taire, et donc de refuser de répondre aux questions qui vous seront posées, soit au contraire d'accepter de répondre, ou de faire toutes déclarations.

2°) Vous avez le droit d'être assisté par un avocat :
Vous pouvez le choisir, ou il sera commis d'office, cela dès le début du placement en garde à vue.

3°) Information sur la Garde à Vue et ses raisons.
On doit vous informer de votre placement en garde à vue, de sa durée prévue, des prolongations dont celle-ci peut faire l'objet. On doit aussi vous notifier l'infraction qu'on vous soupçonne d'avoir commise, ainsi que de la date et du lieu où les faits sont présumés avoir été commis.

4°) Vous avez le droit d'être examiné par un médecin.
Ce droit est inconditionnel. Vous n'avez pas à justifier d'un problème médical quelconque.
Au ca où un peu plus tard, vous seriez victime d'un accident...

5°) Vous avez le droit de faire prévenir un proche et votre employeur :
Egalement, si vous êtes étranger, faire prévenir les autorités consulaires de votre Etat d'origine.

6°) Si besoin, le droit d'être assistée par un interprète.

7°) Le droit de présenter des observations au magistrat.
Vous avez le droit de faire présenter des observations au magistrat qui doit se prononcer sur la prolongation de votre garde à vue, afin notamment de demander qu'il y soit mis fin.

8°) Le droit de consulter certaines pièces de son dossier :
Le gardé à vue doit désormais être également informé de son droit à consulter, dans les meilleurs délais et au plus tard avant l'éventuelle prolongation de la garde à vue :
--    Le procès verbal constatant son placement en garde à vue.
--    L'éventuel certificat médical établi par le médecin.
--    Ainsi que les procès verbaux de ses propres auditions.

9°) Le droit de manger des plats chauds :
C'est nouveau, vous avez désormais le droit de vous voir servi des repas chauds, et surtout, qui tiennent compte de vos préférences religieuses... Ces repas seront servis plusieurs fois, s'il le faut, en fonction de la durée de la garde à vue dont vous faites l'objet.

À noter : un document écrit énonçant ces droits est remis à la personne lors de la notification de sa garde à vue. Il doit employer des termes simples et accessibles et dans une langue comprise par la personne concernée.



3   L'Assistance par un avocat

Si le gardé à vue veut un avocat, sa première audition, sauf si elle porte sur son identité, ne peut débuter sans la présence de ce dernier avant la fin d'un délai de deux heures. Le procureur peut cependant autoriser une audition immédiate du gardé à vue sans attendre son avocat si les circonstances l'exigent.
NOTE : OK, mais dans ce cas, comme vous pouvez de toutes façons refuser de parler, ça revient à un droit inconditionnel à un avocat présent dès qu'un interrogatoire à lieu...

A son arrivée, l'avocat peut s'entretenir avec son client pendant 30 minutes et consulter :
--    Les procès verbaux d'audition.
--    Le procès verbal constatant le placement en garde à vue.
--    Et l'éventuel certificat médical établi.
--    Il peut assister à tous les interrogatoires et prendre des notes.

A l'issue de chaque interrogatoire, l'avocat peut poser des questions.
Le policier ou gendarme ne peut s'y opposer que si celles-ci sont de nature à nuire au bon déroulement de l'enquête. Mention de ce refus est portée au procès-verbal.
L'avocat peut également présenter des observations écrites dans lesquelles il peut consigner les questions refusées. Elles sont jointes à la procédure. L'avocat peut aussi adresser directement ses observations, ou copie de celles-ci, au procureur pendant la durée de la garde à vue.

Pour les affaires complexes, l'intervention de l'avocat peut être différée de 12 heures (voire de 24 heures), sur décision du procureur de la République. Elle peut aussi être différée jusqu'à 72 heures, sur décision du juge des libertés et de la détention ou du juge d'instruction.








Article 62-2 du Code de Procédure Pénale. Conditions pour un placement en garde à vue.
Articles 63 à 63-5 du Code de Procédure Pénale. Droits du gardé à vue.
Article 706-88 à 706-88-1 du Code de Procédure Pénale. Durée de la garde à vue applicable aux actes de terrorisme et à la criminalité organisée.
Article 803-2 et 803-3 du Code de Procédure Pénale : Défèrement devant un magistrat.